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Guy Wagner – Détérioration de l’environnement économique

Actualité et analyses des marchés financiers
animé par Guy Wagner, Chief Investment Officer et l’équipe de gestion de BLI

A moins d’une escalade de la situation, l’impact de la guerre en Ukraine sur l’économie mondiale s’exercera essentiellement à travers la hausse des cours des matières premières. Cette hausse, en premier lieu celle du coût de l’énergie, renforce les pressions inflationnistes et risque de maintenir l’inflation à un niveau plus élevé pendant plus longtemps.


Dans une telle situation, les revenus réels des ménages (et donc leur pouvoir d’achat) ainsi que les marges bénéficiaires de nombreuses entreprises (et donc leurs bénéfices) baissent, ce qui a un impact négatif sur la consommation et l’investissement privés, et, partant, sur la croissance économique. Le spectre de la stagflation refait dès lors surface, en particulier en Europe.


Cette guerre intervient par ailleurs à un moment où les banques centrales avaient décidé de changer d’attitude en matière de politique monétaire. Alors que pendant longtemps, elles ont considéré la remontée de l’inflation comme un phénomène temporaire ne nécessitant pas une intervention de leur part, elles ont commencé à changer leur discours vers la fin de l’année dernière. Alors qu’il y a encore quelques mois, elles excluaient toute hausse de leur taux directeur au premier semestre 2022, elles envisagent maintenant un resserrement monétaire assez agressif, à commencer par la Réserve fédérale. Les marchés tablent dorénavant sur 5 à 6 hausses de taux de la banque centrale américaine d’ici fin 2022. En zone euro, une première hausse du loyer de l’argent est anticipée pour le second semestre 2022. Celle-ci sera néanmoins dépendante de l’évolution de la dynamique économique.


La détérioration de la situation économique et le changement d’attitude des banques centrales entraînent tout naturellement un rebond de la volatilité sur les marchés financiers ainsi qu’une remontée des primes de risque demandées par les investisseurs. Or, qui dit prime de risque plus élevée dit multiples de valorisation plus faibles. Le recul de quelque 7 % enregistré par le marché mondial depuis le début de l’année ne devrait dès lors pas étonner et semble même encore très modéré. D’autant plus que, contrairement à ce qui s’était passé lors des corrections importantes des dernières années, ce recul des cours boursiers n’a pas entraîné une baisse des taux obligataires, ces derniers continuant au contraire à monter.
Au niveau régional, le marché américain a nettement mieux résisté que les marchés européens, profitant de son statut de valeur refuge et du fait que l’économie américaine est moins impactée par la guerre en Ukraine que l’économie européenne. Les valeurs refuges, telles que l’or, le franc suisse et le yen japonais ont pleinement rempli leur rôle d’amortisseur depuis le déclenchement des hostilités en Ukraine et affichent des performances positives.


Quelles implications pour les marchés boursiers ?
Les perspectives des marchés boursiers se sont assombries au cours des derniers mois. Si les investisseurs exigent une prime de risque plus élevée pour investir en actions, il faudra soit que le taux sans risque baisse (or, comme indiqué supra, les taux d’intérêt sont plutôt orientés à la hausse) ou que le rendement à attendre des actions monte (ce qui signifie en principe que les multiples de valorisation doivent diminuer).

D’une manière générale, il convient d’ailleurs de noter que les facteurs à l’origine de l’inflation des prix des actifs financiers sur les dernières décennies sont en train de disparaître, voire de se retourner :
– le « dividende de la paix » de l’après-guerre froide est en train de disparaître avec la nouvelle fragmentation de l’économie mondiale autour des deux pôles Etats-Unis et Chine ;
– la crise financière, la pandémie et la guerre en Ukraine ont montré les dangers d’un modèle économique basé sur l’efficience au détriment de la sécurité. L’ère de la globalisation semble faire place à une ère où les relations économiques et commerciales seront à nouveau de plus en plus conditionnées par des préoccupations de sécurité nationale ;
– après des années de baisse, la part du travail dans le Revenu National commence à augmenter à nouveau. Cette augmentation pointe vers une diminution des marges bénéficiaires des entreprises, marges se trouvant actuellement à des niveaux historiquement élevés ;
– l’apparition de chaînes d’approvision-nement moins efficaces dans beaucoup de marchés (main-d’oeuvre, matières premières, …) entraînera une instabilité plus grande des prix avec des périodes inflationnistes plus fréquentes. Ce changement dans le régime des prix mettra fin aux politiques monétaires ultra-accommodantes ;
– le mouvement de baisse des taux d’intérêt qui a débuté au début des années 1980 est arrivé à sa fin.


Tout ceci donc à un moment où les multiples de valorisation sont élevés et où les politiques irresponsables des banques centrales ont encouragé un mouvement massif vers les actifs à risque.
Ceci signifie-t-il donc qu’il y a lieu de délaisser complètement les actions ? La réponse est clairement non ! Tout d’abord, s’il est vrai que les taux d’intérêt semblent aujourd’hui orientés à la hausse, tout porte à croire que cette hausse restera relativement modérée (et le risque d’un ralentissement économique prononcé à la suite des événements récents pourrait d’ailleurs tempérer l’ardeur des banques centrales). Plus spécifiquement, les taux d’intérêt devraient rester négatifs en termes réels (ajustés pour l’inflation). Un environnement marqué par des taux d’intérêt réels négatifs n’est pas défavorable aux actions. D’autant plus que dans un tel environnement, les placements monétaires et obligataires ne constituent pas vraiment une alternative attrayante.
Plus fondamentalement, il y a le fait qu’il est tout simplement erroné de considérer les actions comme une classe d’actifs homogène, de sorte que des questions comme celle soulevée supra n’ont aucun sens. L’achat d’une action correspond à une prise de participation dans une entreprise. Les questions qu’un investisseur devrait se poser se résument dès lors à la qualité de l’entreprise (est-ce qu’elle réussit à continuellement générer un rendement sur capital investi supérieur au coût de ce capital, créant ainsi de la valeur pour ses actionnaires ?) et au prix payé pour acquérir cette participation. Cette façon de procéder contraste évidemment avec la tendance actuelle vers la gestion passive. Sur base de la relation historique entre niveaux de valorisation et rendements subséquents, les rendements à attendre des principaux indices boursiers dans les années à venir risqueront en effet d’être très faibles.

Au vu de ce qui précède, la sélection de valeurs revêtira beaucoup d’importance dans les années à venir. Les critères de sélection devraient tourner autour des constatations suivantes :


– dans un environnement plus inflationniste, les coûts de production des entreprises vont augmenter. Il faudra dès lors faire la distinction entre les entreprises qui pourront faire passer cette augmentation à leurs clients à travers une hausse de leurs prix de vente et les entreprises qui devront absorber cette augmentation à travers une contraction de leurs marges bénéficiaires. Pour un investisseur, seules les actions des entreprises figurant dans la première catégorie constitueront une protection contre l’inflation. (On ne peut ainsi pas généraliser en affirmant que les actions constituent toujours une protection contre l’inflation, comme d’aucuns le font.) ;
– dans un environnement où les taux d’intérêt montent, il faudra délaisser les entreprises fortement endettées ;
– dans un environnement où la croissance risque de devenir plus rare, il faudra trouver les entreprises bénéficiant de tendances structurelles ;
– dans un environnement où les considéra-tions d’ordre ESG (Environnement, Social, Gouvernance) prennent de plus en plus d’importance, il faudra privilégier les entreprises qui intègrent ces considérations dans leur modèle d’entreprise et renforcent ainsi leur avantage compétitif.
Dans des marchés boursiers qui aiment faire la distinction entre les styles « croissance » et « value », ces critères plaident clairement en faveur d’une poursuite de la surperformance structurelle du style « croissance ».


En résumé, nous continuons à croire aux actions, à condition d’être sélectif, d’adopter un horizon d’investissement approprié, d’adapter ses attentes de rendement et d’accepter une volatilité plus importante.


Un mot sur l’or et les entreprises aurifères
L’or a rempli son rôle de valeur refuge dans le conflit actuel, le cours du métal jaune s’étant apprécié de 12 % entre fin 2021 et le 8 mars 2022, alors que sur la même période, l’indice mondial des actions a reculé d’environ 10 %. Alors que par moments, la corrélation des entreprises aurifères est plus étroite avec le marché boursier qu’avec le cours de l’or, tel n’a pas été le cas cette fois-ci et les cours de ces entreprises ont amplifié le mouvement du métal jaune, offrant ainsi une protection supplémentaire aux investisseurs.
Les perspectives pour l’or demeurent favorables, même s’il faudra être conscient qu’une fin rapide de la guerre en Ukraine risquerait d’entraîner une chute de son cours : les taux d’intérêt devraient rester négatifs en termes réels et les risques géopolitiques plus élevés que par le passé. A cela s’ajoute un autre élément : les sanctions prises à l’égard de la Russie ne devraient que renforcer la volonté d’un certain nombre de pays de réduire leur dépendance au dollar et celle de la Chine d’offrir une alternative au système financier actuel, basé sur la monnaie américaine. Ces développements joueront en faveur du métal jaune dont l’offre ne va par ailleurs pas beaucoup augmenter dans les années à venir.

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